Emilien Jacquelin, biathlète, interviewé par les élèves de l'école élémentaire de Meythet Centre, ce vendredi 12 mai.
Interview
1. A quel âge avez-vous commencé le ski ?
Je fais du ski depuis tout petit, depuis que j’ai l’âge de 3 ans et c’est à partir de 15 ans que j’ai choisi de faire du biathlon. Avant ça, je faisais juste du ski de fond et après, j’ai eu une carabine dans le dos et il m’a fallu des années et des années de travail pour arriver aujourd’hui à ce niveau-là.
2. Que faites-vous aux entrainements ?
En entrainement, j’ai de la chance car je ne fais pas que du ski. Je m’entraine tout l’été, j’ai même repris l’entrainement depuis deux semaines. Je travaille le vélo, la course à pied, et je fais même du ski à roulettes. Le ski à roulettes, pour ceux qui ne connaissent pas, c’est des skis, comme son nom l’indique avec des roulettes, qui ressemblent plus à des rollers qu’à des skis de fond et ça nous permet de travailler sur des routes et des pistes faites pour ça. Et on s’entraîne 11 mois de l’année.
3. Suivez-vous un régime alimentaire particulier pour pouvoir faire du biathlon ?
Oui, ce n’est pas un régime qui est très dur, je me fais plaisir quand même mais je fais aussi très attention car c’est un sport d’endurance, et comme pour une voiture, pour avoir la bonne énergie, il faut avoir la meilleure forme physique. Donc, je mange sainement, c’est beaucoup de légumes, des protéines et bien sûr des glucides. On fait bien attention à tout ce qui est sucre.
4. Quelle est l’ambiance entre les gens de l’équipe de France ?
Elle est bonne. C’est super car on est tous différents et on s’entend tous très bien ensemble. Je trouve que c’est quelque chose de super intéressant pour tout le monde car malgré nos différences on peut s’entendre et passer des bons moments tous ensemble et ça c’est ce qui fait notre force dans l’équipe.
5. Combien d’heures d’entrainement faites-vous par jour ?
Par jour, je vais faire entre 5 et 6 heures d’entrainement, c’est pour ça que ça reste un métier, moi de mes journées je fais du sport et entre les séances de sport, je prends soin de mon corps, je vais faire des étirements, de la mobilité, du soin aussi ( kiné, ostéo ...). En gros, mon corps c’est mon outil de travail donc je suis obligé d’en prendre soin tout le temps.
6. Comment vous sentez-vous après une victoire ou une défaite ?
C’est pas la même chose (rires). Après une victoire, je me sens très content, je travaille énormément. C’est comme toi, si tu as une bonne note, tu vas être très fier de toi, parce que tu as bien travaillé et du coup il y a beaucoup de fierté et après une défaite, bien sûr je suis triste, très déçu mais finalement j’essaie de toujours voir le positif pour essayer d’avancer, essayer de penser aux prochaines compétitions. Il y a toujours du positif qui va arriver, je peux être très déçu mais c’est pas une fin en soi.
7. Comment obtenez-vous votre matériel de ski ?
J’ai de la chance, en tant que sportif de haut niveau, j’ai des personnes qui s’occupent de mon matériel. J’ai un technicien qui va s’occuper de toutes mes paires de ski durant l’hiver, donc moi, j’ai la partie facile de monter sur les skis et de courir avec. J’ai environ 25 paires de skis et c’est cette personne-là qui va s’occuper de les farter, c’est à dire d’entretenir le ski pour qu’il glisse le mieux possible durant l’hiver. C’est très important pour aller vite et du coup c’est lui qui s’occupe de trier ces paires selon la course, selon la neige. Il peut y avoir des neiges très froides et très dures et le lendemain, il peut faire très chaud, donc ça peut être « de la soupe ». Chaque paire de skis va avoir son utilité pour des neiges différentes donc là c’est mon technicien qui s’occupe de faire ce travail là.
8. Comment choisissez-vous votre coach ?
Le coach est choisi non pas par les athlètes mais par la fédération, c’est-à-dire qu’il y a des personnes au-dessus des entraîneurs qui vont avoir une vision plus globale des athlètes, des générations pour préparer l’avenir tout en ayant les meilleurs athlètes possibles pour gagner dès aujourd’hui et ce sont eux qui choisissent de mettre des entraineurs en place en fonction des qualités des entraîneurs.
9. Quel est le premier sport que vous avez pratiqué ?
Le premier sport que j’ai pratiqué c’est le cyclisme, c’est du vélo. Moi le vélo, c’est mon sport favori encore aujourd’hui, c’est le sport que j’aime le plus et après j’ai choisi de faire du biathlon car tout simplement, j’étais plus doué dedans que dans le vélo. J’ai aussi pratiqué du judo et du ski alpin.
10. En quelle année avez-vous commencé le ski de fond ?
J’ai attaqué à 3 ans et après j’ai été en club, j’ai pu en faire avec des amis, avec des encadrants qui m’ont aidé à progresser, à commencer à me faire plaisir. Et ça, j’ai commencé à 6 ans.
11. Qu’est-ce qui vous a amené à faire du biathlon ?
J’ai suivi mes grands frères, j’ai 3 grands frères qui avant moi faisaient du biathlon. Donc j’ai voulu les imiter et suivre leurs traces et je suis tombé dedans.
12. Avez-vous une idole qui vous a poussé à faire du biathlon ?
Tout d’abord mes grands frères, ils m’ont motivé mais après Martin Fourcade a été un modèle, il m’a donné envie de continuer et de réussir.
13. Quel est votre état d’esprit avant une course ?
Avant une course, j’ai une routine, je peux être très stressé, je peux avoir vraiment peur, c’est normal de sentir un peu de stress avant d’effectuer des choses qui vous tiennent à coeur, mais moi j’essaie de me concentrer sur ma respiration, de faire de la méditation pour essayer de me calmer et de retrouver un peu de sérénité. J’arrive à faire une force de mon stress grâce à la concentration.
14. Quelle est la personne que tu admires le plus dans ce sport ?
Alors, le souci c’est que si j’admire trop une personne, j’aurai pas envie de battre cette personne. Il y a des athlètes que j’aime beaucoup : Martin Fourcade bien sûr, ancien biathlète français, multiple champion olympique et aujourd’hui le meilleur biathlète au monde, c’est un Norvégien, Johannes Boe et qui est vraiment quelqu’un de très gentil au-delà de ses performances. Donc, c’est quelqu’un que j’admire beaucoup.
15. Est-ce que c'est dur de faire la course mentalement et physiquement ?
C’est très dur physiquement, parce qu’il faut imaginer que pendant 30 minutes on est à fond. Imaginez-vous à fond dans la cour de récré pendant 30 minutes, vous allez voir que vous serez très fatigués à la fin et en plus de ça on s’arrête parfois pour tirer et donc tirer ça demande beaucoup de concentration et viser quand l’effort physique nous fatigue, ça peut être très compliqué parfois. Le mélange des deux fait que c’est aussi fatigant mentalement que physiquement.
16. Comment faites-vous pour tirer avec l'essoufflement, pour stabiliser la carabine ?
C’est beaucoup de travail, beaucoup d’heures d’entraînement tout au long de l’été à répéter des tirs et des tirs pour justement habituer notre corps à accepter que c’est dur. C’est via l’entraînement et la répétition qu’on va arriver à s’adapter et après on essaie surtout de se calmer via la respiration, de beaucoup souffler pour essayer de faire redescendre les battements cardiaques et d’essayer de retrouver un peu de lucidité.
17. Quelle est votre course préférée et pourquoi ?
Ma course préférée c’est la poursuite. C’est une course où on part avec des écarts de la course de la veille, c’est-à-dire que par exemple, on va avoir une course le samedi qui s’appelle le Sprint, c’est tout simplement une course individuelle. Chacun de nous part à un moment donné, on doit être le plus rapide possible sur cette course et le lendemain ça établit un classement, on part avec des écarts où c’est récupérable. Donc, c’est une course poursuite, il y a le chasseur et les chassés, et moi j’aime bien être chasseur, j’aime pas être chassé, j’aime bien courir derrière les autres et essayer de les rattraper.
(En fait faut pas faire un trop bon résultat au sprint pour être chasseur ? M Zanini) C’est ça.
18. Est-ce que c’est difficile d’être champion ?
Alors c’est une bonne question philosophique ... En tout cas, c’est un rêve que j’avais quand j’avais ton âge de devenir champion de biathlon, je suis très content de l’avoir réalisé, après aujourd’hui être champion de biathlon, ça te demande aussi beaucoup d’autres qualités que simplement être habile sur les skis et bon derrière une carabine mais encore une fois, j’ai voulu ce métier-là, j’ai voulu réussir, c’est juste une fierté et j’ai la chance de faire le sport que j’aime encore aujourd’hui.
En équipe de France, on est 6 garçons, on s’entraîne la moitié de l’année ensemble, donc on est tout le temps ensemble et le reste du temps on rentre chez nous, on est chacun de notre côté.
(Vous êtes champion du Monde, y a -t-il d’autres titres que vous recherchez à tout prix ? M Zanini )
Moi j’ambitionne dans 3 ans d’être champion olympique, pour celles et ceux qui ne connaissent pas c’est au-dessus encore de champion du monde et c’est une course d’un jour, il n’y a qu’une course tous les 4 ans et c’est pour ça que tout le monde veut la gagner. Et aujourd’hui, j’aimerais devenir champion olympique et les prochains jeux, c’est dans 3 ans en Italie, à Milan.
Un grand merci à Émilien et à nos journalistes en herbe !