Jouer, est-ce bien sérieux ?

De nombreux travaux ont montré le rôle du jeu dans le développement de l’enfant. L’objet de ce travail n’est pas de traiter du problème général de l’introduction du jeu à l’école. Je citerai juste Didier Faradji dans « Calcul mental et stratégie », Cahiers pédagogiques n°448Retour ligne manuel
« Les mathématiques sont par essence abstraites, celles contenues dans le jeu le sont aussi. A la différence des autres sciences, les mathématiques ne peuvent pas en tant que telles être expérimentées. La richesse du jeu, sur un plan purement didactique, tient du fait qu’il offre aux élèves l’occasion de mettre en œuvre ce que l’on pourrait appeler le raisonnement expérimental ».

Le projet concerne la mise en place en CM1 /CM2 d’ateliers de jeux mathématiques construits sur le principe des jeux de société, jeux à règles avec un matériel, auxquels on joue à plusieurs et dont l’enjeu est de gagner la partie. Il s’agit de jeux mathématiques dans la mesure où les connaissances nécessaires à mettre en œuvre pour jouer sont des connaissances mathématiques, mais ce sont pour la plupart des dérivés de jeux de société existant dans le commerce.
Il ne s’agit pas uniquement de remédier à des difficultés mais de conduire les élèves à construire et à s’approprier des connaissances en mathématiques en articulant le plus étroitement possible les séances
« ordinaires » et les séances consacrées aux jeux en réfléchissant aux progressions à mettre en place sur les différentes notions.
Les séances de jeu ne sont donc pas une récompense après un vrai travail, réservée aux plus rapides ou aux plus performants. Elles ont leur rôle à part entière et toute la classe y participe en même temps. Ici, le but n’est pas de jouer mais d’apprendre.

Objectifs  :

Pour les élèves :
- Consolider ses connaissances
- Mettre en œuvre ses connaissances dans un autre contexte
- Vivre des situations proches de l’expérimentation
- Dédramatiser les exercices scolaires habituels
- Systématiser et mémoriser
- S’aider entre élèves
- Valider la réponse d’un autre
- Se poser des questions
- Susciter des émotions contribuant à ancrer les apprentissages en mémoire

Pour l’enseignant :
- Observer les élèves : repérer les difficultés ou les réussites
- Repérer les modalités de raisonnement et d’apprentissage des élèves qui n’apparaissent pas aussi clairement dans le contexte habituel
- Repérer les difficultés d’appropriation de la tâche à partir de la règle
- Utiliser ces observations pour construire les séances suivantes en classe

Organisation des séances :

Déroulement
Les jeux présentés ici ont été pratiqués lors de séances hebdomadaires de 45 minutes. Ils ont été mis en place au deuxième trimestre de l’année scolaire dans une classe de CM1/CM2 . Ils sont sur les thèmes des fractions et des nombres décimaux.
Ils ont été introduits au fur et à mesure que les notions avaient été étudiées en classe. Ils sont tous en plusieurs exemplaires de manière à ce que chaque groupe puisse être autonome.
Les élèves ont constitué librement des groupes de 4, mélangeant CM1 et CM2 .
Lors de chaque séance, un ensemble de plusieurs jeux était proposé par l’enseignante, en fonction de ce qui avait été vu en classe au préalable. Chaque groupe avançait à son rythme en fonction de la durée des parties, seul ou avec l’aide de l’enseignante.

Fiche de jeu
Chaque élève était muni d’une fiche de jeu sur laquelle il inscrivait chaque fois la date, les jeux auxquels il avait joué, ainsi que tout ce qu’il avait besoin d’écrire comme ses propres réponses ou bien des scores. Il pouvait aussi noter des remarques sur le déroulement du jeu, des problèmes rencontrés….
Cette fiche permettait à l’élève de se souvenir, d’une séance sur l’autre, des jeux auxquels il avait déjà joué, et à l’enseignante de suivre le parcours de chaque élève. Elle servait aussi pour les temps de mise en commun.

Synthèse de la séance
Un temps d’échange avait lieu à la fin de chaque séance afin que chacun puisse s’exprimer sur le déroulement, les règles ou les notions mathématiques.
Le rôle de l’enseignant était ici de bien différencier le temps de jeu et le temps de travail proprement dit.
Si cette distinction n’est pas faite assez nettement, les élèves se contenteront de prendre plaisir au jeu sans avoir besoin d’en retenir autre chose que ce qui leur permet de jouer.
« Cette question de savoir comment les connaissances acquises dans des circonstances données peuvent être réutilisées dans d’autres contextes est la question centrale de toute pédagogie. Dans le cas du jeu éducatif, il s’agit de faire en sorte qu’en dehors des circonstances ludiques dans lesquelles ils ont utilisé telle ou telle notion, les élèves effectuent un travail de systématisation et de mémorisation. En quelque sorte, il faut savoir briser la magie du jeu pour échapper à sa fascination et s’arracher au plaisir immédiat du divertissement… On voit qu’en aucun cas la situation de jeu ne se superpose à la situation de travail. Quand on introduit un jeu en classe, il est donc nécessaire d’en expliciter le cadre et d’en indiquer les limites et les objectifs lorsqu’un apprentissage est visé . C’est à ces conditions qu’il trouve sa place à l’école. »
Cahiers pédagogiques N° 448, « Le jeu en classe », décembre 2006
Règles des jeux

La plupart sont issus de « Cap Maths » Hatier.
Ils ont été testés et parfois modifiés : réécriture de la règle, ajout de données pour une auto-correction

Dominos des fractions Dominos des décimaux A la bonne place
Des fractions pour un décimal
Des cartons de toutes les valeurs
Une drôle de grille : trouver le décimal ou trouver les fractions
Loto des décimaux
Le tournoi des décimaux
Le plus grand des trois
Un furet avec la calculette
De moins en moins de chiffres

Un jeu de fractions commandé sur le catalogue « Pichon » constitué d’un ensemble de fractions de disques en plastique a été livré sans aucune règle. Il a été donné tel quel aux élèves avec comme consigne d’inventer et d’écrire sa propre règle puis d’y jouer.